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L'Afrique commentée

27.5.06

Conté: maître ni de l'armée ni de son propre corps?

Jeune Afrique élucide les schismes au sein du militaire guinéen. Le régime du général Lansana Conté a déjà entamé plusieurs purges des forces armées à caractère ethnique. Notamment après le coup d'État manqué du 6 juillet 1985 et la mutinerie transformée en tentative de putsch des 2 et 3 février 1996 (un événement dont j'ai vécu moi-même).

Les règlements de compte n'ont pas cessé là. JA ajoute Le 4 novembre 2005, un décret présidentiel a mis à la retraite d’office 1 872 officiers, sous-officiers et soldats du rang, soit un dixième de l’effectif.

La troupe vit dans des conditions pénibles avec leur pouvoir d'achat largement réduit (comme les Guinéens ordinaires) alors que les hauts officiers se retrouve dans le luxe.

Il n'est donc pas surprenant qu'en dépit des injonctions de ses proches, le chef de l'État mourant vient de refuser un retour en Suisse pour plus de soins médicaux.

24.5.06

Abdoulaye Wade, ou mon meilleur ennemi

Le Monde offre un portrait de la nouvelle démocratie sénégalaise. L'élection présidentielle de 2000 a inauguré l'ère de l'alternance politique. Mais la promesse du Sopi, ou changement, finit par décevoir. Alors que le président Abdoulaye Wade balade aux quatre coins du monde, il semble oublier de gouverner chez lui. Tout comme son homologue nigeriain Obasanjo, Me Wade se préoccupe des affaires pan-africaines davantage que celles de son pays. L'homme qui s'est fait attribuer le prix Félix Houphouët-Boigny pour la paix est trop sensible aux critiques. Il cible presque toute la société civile qui ose le défier. Notamment en multipliant les dérives contre la presse indépendante, sans laquelle il ne se serait jamais retrouvé à la tête de l'État. Même plusieurs alliés d'hier ont quitté le camp présidentiel pour rejoindre l'opposition, comme ses ex-premiers ministres Moustapha Niasse et Idrissa Seck, son ancien dauphin.

Certains traitent le président de la République d'otage de ses proches. L'opposant Abdoulaye Bathily, l'accuse d'être "prisonnier d'une mafia qu'il a lui-même créée." Dénonçant une "dérive dictatoriale", [Bathily] souligne le trouble engendré par la stratégie d'un président qui, après avoir écarté ses alliés, gouverne avec d'anciens ennemis.

De plus, "Le décalage est énorme entre les discours et la réalité, analyse un haut fonctionnaire en poste à Dakar. Les bailleurs de fonds ont besoin de cette fiction. Abandonner Wade reviendrait à reconnaître que tout fiche le camp en Afrique de l'Ouest. Les Européens comme les Américains ont besoin de lui. C'est pourquoi ils le couvrent d'honneurs." En privé, les représentants des innombrables agences internationales et ONG présentes à Dakar appuient cette analyse. A la Banque mondiale, on insiste sur le "bilan global décevant" d'un pays qui figure parmi les plus aidés d'Afrique.

Tout comme Laurent Gbagbo en Côte d'Ivoire, Abdoulaye Wade était l'opposant de toujours avant d'achever la présidence. On aurait espérer que cette expérience lui aurait rendu la patience, la sagesse et la magnanimité de bien gouverner l'ensemble de son pays. Mais on découvre que ni Gbagbo ni Wade n'est Nelson Mandela. Même si le Sénégal n'est pas dans un état pré-génocidaire comme la Côte d'Ivoire, la déception du premier mandat d'Abdoulaye Wade est énorme.

12.5.06

La Guinée vers la tête du classement des États ratés

La revue américaine Foreign Policy a publié (en anglais) son classement d'États ratés. Le classement tient compte d'une dizaine de facteurs dont les droits de l'homme, l'économie et la pression démographique. Sans surprise, les pays en guerre dominent le classement, avec le Soudan, le RD Congo, la Côte d'Ivoire et l'Irak en 'tête.'

Or, c'est intéressant de jeter un coup d'oeil aux États qui ne sont pas (encore) en proie de conflit armé. Par cette mesure, les deux pires États africains sont le Zimbabwe (4e au monde) et la Guinée (11e).

Les troubles du Zimbabwe sont bien chroniquées par la presse internationale; celles de la Guinée moins. En tant que quasi-expert sur la Guinée, j'examine en profondeur l'analyse de FP du pays.

J'ai penché à maintes reprise sur la situation politique paralysée du pays pendant que tout le monde attend la disparition du chef de l'État mourant, le général Lansana Conté. J'ai déploré la dysfuction de l'État guinéen sclérotique et en panne. J'ai condamné l'obstruction posée contre toute tentative de réforme lancée par un premier ministre ou ministre d'État. En conséquence, les deux pires marques attribuées à la Guinée par FP sont en matière de délégitimization de l'État et services publics. Combien discréditées sont les institutions guinéennes? En matière de délégitimization de l'État et services publics, elles se classent derrière celles de la RD Congo et de l'Irak, deux pays synonymes au chaos et à un État qui ne fonctionne pas.

La Guinée a reçu une mauvaise note pour ses élites polarisées. Pas surprenant non plus car chacun des partis politiques importants est perçu comme propre à un groupe ethnique particulier. Les puissantes forces armées sont aussi divisées par ethnies. Beaucoup de monde en craint les effets sur la succession présidentielle.

Dans les années 90, la Guinée a abrité plus d'un demi-million de réfugiés provenant de pays voisins, une crise qui a provoqué beaucoup de problèmes dans le sud-est du pays. La marque de FP souligne l'amélioration de cette crise depuis la résolution (espérée) des guerres civiles libérienne et sierra-léonaise. Aussi, la Guinée subit moins de pression démographique que la plupart des pays africains.

9.5.06

Crise économique guinéenne: des pas dérisoires

L'inflation et la réduction du pouvoir d'achat sont une crise qui continue d'exacerber la misère des Guinéens. Le gouvernment prend encore des nouvelles mesures pour stabiliser la monnaine nationale. La valeur du franc guinéen (FG) ne cesse de plonger. En 1997, un dollar américain achétait 1100 FG; aujourd'hui, il vaut 4500 FG. Le prix d'un sac de riz, l'aliment de base, a doublé en un an.

Selon Guinéenews, le secrétaire général à la présidence, le puissant Fodé Bangoura, a ordonné aux sociétés et autres gros importateurs de ne plus acheter les devises au près des maisons de change. On sait que cette pratique courante entraîne une hausse de besoin des devises étrangères. Cela crée une forte dépréciation du franc guinéen. Mais aussi, on sait que la raison fondamentale de cette voie de recours faite par les sociétés et les gros importateurs est le manque de devises à la Banque.

Bangoura a aussi demandé aux commerçants de ne pas vendre le riz importé et la viande au-dessus des prix qu'il a précisés.

Mais les observateurs demeurent pessimistes. Guinéenews souligne qu'[i]l y a un mois déjà le même ordre a été donné par la même autorité en commun accord avec les importateurs mais dans la capitale, le prix du riz a augmenté de 10 pour cent depuis lors.

5.5.06

Wade recompensée par... Bédié?!!

Selon Abidjan.net, le président sénégalais Abdoulaye Wade sera nommé lauréat du prix Félix Houphouët-Boigny.

Ce prix est attribué à une personne qui oeuvre en faveur de la recherche de la paix. Félix Houphouët-Boigny fut père-fondateur de la Côte d'Ivoire et président à vie. Après sa mort, le pays commençait à s'écrouler.

L'un des invités à la cérémonie de récompense sera Henri Konan Bédié. Bédié s'est succedé à Houphouët. Son régime a fait de l'Ivoirité, une idéologie raciste et xénophobie, la politique de l'État. L'ouverture il y a une décennie de cette boîte de Pandore de haîne et d'exclusion a mené le pays vers une descente aux enfers.

Ironiquement, l'un des conflits auxquels le président Wade s'implique est celui de la Côte d'Ivoire... une crise initiée par Bédié.